Son visage est rectangulaire. Ses traits bien que fins ont une certaine maturité. Logique pour un quarantenaire. Valéri prend soin de lui que ce soit physiquement tout comme vestimentaire. Il est massif, large d'épaules. Il a la carrure de ces athlètes que l'on peut croiser dans les sports violents. Il a même pratiqué le Rugby à l'université lors de sa tendre jeunesse et a sut conserver une belle forme physique malgré l'âge. La musculature globale de Valéri est arrondie, modelée comme ces statues de pierre de la Grèce antique. On voit bien qu'il a su prendre soin de lui et qu'il éprouve un certain plaisir à la coquetterie dans des costumes hors de prix et son mode de vie bourgeoise. Toujours soigné et élégant en toutes occasions, y compris lorsqu'il est en mission. On ne le verra jamais en jogging ou fringué comme un malpropre. Il passera toujours un certain temps dans la salle de bain à soigner son apparence. Question de style. Il apprécie passer chez son barbier et sentir l’after-shave. Un mélange de cacao amère ou de fève grillée que l'on peut retrouver dans son parfum habituel et la nicotine de ses cigarettes.

Cet inspecteur inspire la crainte et le respect par ce sang froid de façade et cette rigidité professionnelle. Valéri a le sourire facile : parfois sournois, moqueur, amusé. Sa chevelure, assez épaisse bien qu'il porte les cheveux relativement courts et coiffés vers l'arrière, est châtain foncés et ses yeux d'une couleur marron n'empêche en rien un regard foudroyant. L'ensemble de son corps est très proportionnel et l'on peut sentir chez lui une certaine noblesse, presque une retenue quelque peu mondaine. Quand à la force physique pure, on peut aisément dire qu'il sait parfaitement donner des coups. Les poings de Valéri sont comme des massues qui s'abattent. Valéri est dans la brutalité bestiale et ne s'en cache pas.

Même sa démarche respire l'homme, le vrai, la virilité pure. Il se déplace de manière silencieuse, évoluant dans son espace vital comme un lion en cage et lorsqu'il s'élance, c'est plus un gros bulldozer. Il a besoin de se défouler. C'est un excellent tireur et s'avère très efficace quand à s'occuper de la paperasse administrative, bien que ce ne soit pas un réel plaisir. Tout en lui évoque cet aspect professionnel et à la fois cette touche bourgeoise, que ce soit dans son attitude ou son apparence globale.

Professionnellement :

Certains le trouveront hautain, autoritaire, inflexible, stricte voir condescendant et d'autres apprécieront, au contraire, cette maturité, cette culture qu'il possède et sa droiture. Valéri est issue de grandes écoles, il a reçu une éducation relativement rude et applique la même méthode à ses "hommes". Il sait se faire respecter, n'hésite pas à taper du poing sur la table lorsqu'il le faut mais il se montre également juste. Cependant, il ne supporte guère l'échec, relativement intransigeant et d'une patience limité. Il donne une chance, une seule, jamais deux. Travailler sous ses ordres, c'est être capable de démontrer son efficacité. Il n'aime pas les tire-au-flancs, ni même les idiots. Il aspire à une sorte de prestige, d'excellence au sein de son unité. En faire parti est comme posséder un saint Graal, décroché par la seule force de son travail. Valéri ne tolère pas les faibles, les retards, qu'on lui manque de respect ou que l'on ne s'applique pas dans son travail.

Valéri est également exigent envers lui-même, il sait se remettre en question, écouter les bons conseils, respectant la hiérarchie et scrupuleusement les lois. Cependant, il est bien rare que l'on arrive à lui faire changer d'avis lorsqu'il a une opinion sur quelqu'un ou quelque chose en particulier. Ce n'est même pas qu'il est buté mais simplement assez vieux pour se le permettre. Ne dit-on pas que l'âge forme la sagesse ? Ce n'est pas forcément vrai et il est le premier à l'admettre. Toutefois, on ne peut guère oublier l'expérience, la réelle, celle que l'on cumule uniquement avec les années. Et cette dernière pèse lourd dans la balance. Valéri est quelqu'un d'une extrême logique, c'est même agaçant. Par exemple, lorsqu'on lui parle de corruption, il vous dirige vers la source du problème et non pas la quête de solutions inutiles. Ses sourires affichent sans conteste ses pensées du moment et il n'éprouve aucune honte à cela. Il faut se méfier de son haussement de sourcil, signe assez distinctif que l'on vient de dépasser les bornes ou encore de son retroussage de manches qui indique clairement qu'il va vous taper dessus sans réelles sommations.

En société :

Valéri adore le contacte. Que ce soit en bon ou en mauvais. Dans la plupart des cas, il se montrera agréable, charmant, même un poil romantique et galant. C'est son côté "Russe" dirons-nous. Un aspect tout à fait appréciable si l'on considère qu'il vous ouvre la porte, vous sourit, vous offre même des fleurs ou porte votre sac. Il a bel et bien ce côté bourgeois, presque gentilhomme respectable. Mais il a un côté beaucoup plus sombre, beaucoup de défauts qu'il cache habilement à cette société. Oh ! il n'a pas spécialement honte d'en arriver aux mains, surtout en sachant que sa patience est très relative, ni même qu'il se montre brutal.

Non, ce qui le dérange le plus, c'est un côté malsain.

Une sorte de perversité, presque une sorte de besoin, quand à briser la moindre de vos résistances, quitte à le faire de la façon la plus violente qui soit, physiquement parlant. Il n'aime pas être trompé et usera de stratagèmes très élaborés pour obtenir vengeance. Ses calculs sont méthodiques, dangereusement sournois. Cela se lit dans son regard, la façon dont il s'approche, avec ce petit sourire en coin, les manches relevées, soigneusement pliées sur ses coudes. Mais cette une facette qu'il maquille habillement et qu'il laisse resurgir dans l'intimité la plus proche, quand il est seul avec vous, qu'il sait que personne ne regarde ou n'entend. Valéri est comme le volcan, bouillonnant, radical et expéditif.

Bien que sa mémoire soit quelque peu défaillante sur ce qui est de son passé (sans doute un effet secondaire du traitement qu'il a reçu avant d'arriver dans ce projet bien que cette notion n'ai pas été étudiée), il se souvient des grandes lignes, des connaissances acquises qui ne peuvent pas être ébranlées, de souvenirs trop puissants qui ne peuvent être effacés. Une seule chose est certaine : Il a reçu la même lettre que les autres avant lui et après lui. Cela va bientôt faire quinze ans. Il n'a pas vraiment chercher à en savoir plus et s'est adapté. Comme si tout cela était naturel. Mais ça ne l'était pas. Il le sentait dans ces tripes. Quelque chose grouillait au fond de ses plus bas instincts, comme une forme sous-jacente primaire et grandissante. Celle qui vous ronge. Il avait déjà les quelques instincts d'enquêtes, voyez-vous. Il a étudié son cas comme un flic. Comme si cela était dans ses gênes. Il en est venu à de simples déductions :

Premier point. Il sait qu'il n'est pas mort ce jour là. C'est autre chose. Le cortex reptilien dans toute sa splendeur qui régie, dans sa fiabilité, vos plus simples fonctions, comme celle de respirer, était actif. Sa poitrine s'est soulevée, il a avalé de l'air, l'expira. Ses fonctions vitales étaient bien présentes. Il ouvra les yeux, observa, il voyait son nouvel environnement. Son attention s'était porté sur les bruits qui l'entouraient, il entendait sans difficultés apparentes. Le cerveau limbique est quelque peu embrouillé. Les souvenirs étaient certes vagues. Les moins importants avaient complètement disparus mais son jugement personnel en tant que tel, ses valeurs qu'il a reçu au long de sa vie qu'elles soient morales ou immorales étaient toujours là. Il ne se rappelait pas avoir changé de comportement non plus, tout du moins, il n'en avait pas l'impression sur le moment. C'était bien toujours lui, sous la même forme, à l'identique. Le Néo-cortex a gardé les traces de l'apprentissage, cette rudesse des Russes quand à obéir, la capacité de raisonnement et de logique fonctionnent. Ce n'était donc pas une défaillance de son système cérébrale. Il s'est levé, il a marché, il a remué les bras et son corps bougeait normalement. Ce n'était pas non plus un soucis mécanique. Mis à part ce mal de tête persistant qui a perduré encore quelques jours après son réveil, il n'avait pas d'autres indices sur le pourquoi ou le comment.

Le second point. Il ne reconnaissait pas les rues, ni les maisons, ni les arbres. Chacun des murs qui l'emprisonnaient dans ce monde lui étaient totalement inconnus. Il ne reconnaissait aucun proche, pour peu qu'il a allègrement croisé du monde en ces quelques quinze années de présence. Il a lu cette lettre plusieurs fois, tentant de décrypter le sens caché et ne pouvait pas vraiment se conformer au simple fait d'avoir été "sélectionné". Pour une bonne et simple raison : il ne se souvenait d'aucun test ni d'aucune signature de contrat. Pour une chose aussi importante, il s'en serait forcément souvenu. Tout du moins, c'est sa propre certitude et non une donnée formelle. Il a fouillé ses poches, il avait toujours son portefeuille avec sa seule identité sur sa carte : nom, prénom, date de naissance, lieu de naissance. Il est né un 7 Août à Moscou, c'est au moins une piste. Pas d'argent, pas même un seul rouble. Il portait encore son alliance à son doigt et la conserve encore. Il a trouvé également une photo de sa femme et de son fils, sans vraiment arriver à se remémorer leur simples prénoms ou leurs passages dans sa vie avant ici. Il sait également que ce mariage n'a pas fonctionné et qu'il a très peu participé à l'éducation de son unique enfant. Il se souvient qu'il travaillait déjà beaucoup à l'époque bien que ce soit encore bien vague. Il a gardé cela en lui, cette passion, cette focalisation, cet acharnement presque viscéral. Il se rappelle également d'études supérieurs mais ne saurait dire lesquelles si ce n'est qu'elles avaient un rapport avec le droit. Il se souvient aussi de valeurs morales, de cette forme de dévouement à la nation que seuls les Russes possèdent, vaguement d'une certaine richesse financière que ces parents et lui-même possédaient, de ce milieu mondain presque aristocratique qui ne résident qu'en un brouillage d'or et de paillettes. Car oui, il est Russe. Il en garde d'ailleurs un léger accent bien qu'il se soit habitué à son environnement. Il se remémore parfois les hivers à Moscou, parfois même des yeux de sa mère, si bleus, si aimants et l'attitude stricte de son père sans vraiment arriver à discerner les visages des proches qui l'ont entouré. Il ne se souvient pas de ses anciens amis, il devait pourtant en avoir, il n'est pas désagréable à ce point là.

Des questions sont restées sans réponses depuis ce jour : pourquoi personne ne l'a cherché ? Sa vie était-elle si merdique qu'il en décide du jour au lendemain à s'expatrier dans un monde clos ? Avait-il commis un crime pour se lancer tête baissée dans un tel projet ? Il n'en sait rien. Il en est venu à une conclusion : Il était forcément volontaire. Et même si cela n'est pas forcément la vérité, il s'en contente. C'est la seule qui pouvait se conformer à sa logique la plus basique. Et dieu sait qu'il a passé en revue toutes les autres possibilités, y compris les pires. Alors, il a fait avec.

Il a cherché à s'intégrer, en gardant en tête les avertissements de la lettre, portant ce sac comme unique sauvegarde très rudimentaire. Une seule semaine de vivres, cela faisait peu dans un univers loin d'être mignon. On t'a fait bien comprendre que si tu ne te magnes pas le cul très vite, tu risques de crever. Message personnellement reçu. Et là encore, ce sont ses instincts qui l'ont poussé. Il lui fallait un travail avant toute chose, pas n'importe quoi non plus. Il a commencé comme simple "Enquêteur", autant nommer cela ainsi. Le flic de base, qui sait analysé après une longue observation. Il fallait se familiariser avec les lois et la langue de ce nouveau monde. Et cela n'a pas été simple avec tout cet échange ethnique dans cette ville. Y avait-il d'ailleurs une langue vraiment officielle ? Et bien,oui. L'anglais de rigueur. Simple logique là encore. Apprendre une autre langue est déjà une difficulté en soit, c'est pour cela qu'il a encore un léger accent. Le travail de terrain est certainement celui qui lui plaisait le plus à cette époque. Il avait un contact plus directe avec la population, cela facilitait les échanges d'informations, la connaissance des lieux dans ses moindres recoins ou presque, les personnes à éviter ou à toujours garder sous le coude, la politique des lieux et son organisation. Car oui, lorsqu'on est flic, on devient forcément très observateur. Cela n'empêchait pas de tomber dans quelques pièges, de les éviter de justesse, parfois changeants ou non.

Puis cela a été la quête du lieux de vie. Car sans salaire, vous ne pouvez certainement pas payer un loyer et encore moins vous nourrir. Et si il y a bien une chose qu'il faut éviter ici, c'est d'être faible. Tout ceci n'est finalement que de la simple survie, rudimentaire ça va de soit mais essentielle. Et pour gagner un meilleur salaire, il faut travailler. Durement. Une chose qu'il effectuait sans réel soucis d'ailleurs. Il pestait même à la contrainte horaire et aux deux jours de repos. Pour lui, c'était des journées de perdues. Il se dit qu'il aurait peut-être été utile en tant qu'avocat ou magistrat mais il se voyait mal derrière un bureau bien qu'à présent ce soit le cas. Techniquement parlant. Finalement, il se complaît aisément dans cette fonction, y trouve son compte quelque part.

Il y a une chose qu'il a compris depuis un bon moment : si l'on veut quelque chose en ce bas monde, il suffit de se salir les mains. Il n'hésite pas à passer par les gangs. Ici tout se cultive par soi-même, autant dire que laisser quelques trafiquants refourguer leur came en échange d'une bonne bouteille ne lui pose aucun problème. Le tabac, par contre, c'est plus compliqué. Non seulement au niveau de la pousse, il lui arrive souvent de se faire voler quelques feuilles, il enquête régulièrement pour mettre la main sur le voleur potentiel. Comme on dit : La main dans le sac. Certains diront qu'il est corrompu et franchement, il l'assume. A l'heure d'aujourd'hui, il se rappelle d'un nom : Grigory. Celui de son fils. Il le revoit parfois jouer avec son petit ballon et venir à sa rencontre, les quelques rares moments qu'il viendrait à regretter de son ancienne vie. Mais finalement ? Qui cela préoccupe-t-il vraiment ? Il ne cherche plus à expliquer son passage, ni même ce qu'il a pu faire avant tout cela. Il sait juste que si il en est là, maintenant, dans son métier actuel, dans son nouvel univers, c'est qu'il ne devait pas être si éloigné que cela de la vérité.

Peut-être est-ce justement cela ... Une simple vérité. Un monde que l'on a jamais réellement quitté.